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Champagne !
Rencontre avec Nicolas Vanier
Pour la première fois, le grand réalisateur et documentariste Nicolas Vanier (Le Dernier Trappeur, Donne-moi des ailes) s’éloigne des thématiques écologistes et signe un véritable buddy-movie rafraîchissant, porté par un casting cinq étoiles. Rencontre avec l’infatigable artiste, avide d’aventure et de changements de registre.
Pour la première fois, le grand réalisateur et documentariste Nicolas Vanier (Le Dernier Trappeur, Donne-moi des ailes) s’éloigne des thématiques écologistes et signe un véritable buddy-movie rafraîchissant, porté par un casting cinq étoiles. Rencontre avec l’infatigable artiste, avide d’aventure et de changements de registre.
Jean (François-Xavier Demaison), Patrick (Stéphane de Groodt), Romane (Elsa Zylberstein), Joanna (Sylvie Testud) et Guillaume (Éric Elmosnino) sont amis depuis 30 ans. Malgré les mariages et les enfants, leur amitié est restée solide. À l’aube de l’enterrement de vie de garçon de Patrick, le dernier célibataire de la bande, cette amitié va être mise à l’épreuve par l’arrivée impromptue de sa future épouse, Christine (Claire Chust).
SI VOUS CHANGEZ DE REGISTRE AVEC CHAMPAGNE !, DIRIEZ-VOUS QUE C’EST UN PROLONGEMENT LOGIQUE DANS VOTRE CARRIÈRE ?
Je ne sais pas, mais c’était une envie forte qui a grandi au fur et à mesure depuis mon film L’École buissonnière (2017). Avec le manque de confiance qui me caractérise, j’ai eu besoin du soutien d’acteurs ou de producteurs pour me lancer ; des gens comme François Cluzet, Jean-Paul Rouve ou Patrick Timsit m’ont dit que j’étais fait pour la fiction. C’est vrai que je prends de plus en plus de plaisir, au fil des films, à utiliser les acteurs dans un registre comique ou dramatique… Lorsque l’occasion s’est présentée de réaliser ce beau projet sur l’amitié, je n’ai donc plus hésité !
COMMENT AVEZ-VOUS RÉAGI À LA LECTURE DU SCÉNARIO ?
C’est un vrai « film de potes » et, en tant qu’amoureux des films de Claude Sautet, j’avais très envie d’explorer ce domaine qui est l’amitié. J’ai eu la chance de me retrouver avec douze de mes meilleurs amis enfermé pendant cinq semaines à fabriquer une maison ; cela m’a aussi beaucoup inspiré pour le film. L’amour est un thème de cinéma formidable, or je trouve que l’amitié l’est encore plus ! Je ne pourrais jamais envisager de ne pas avoir d’amis, mais pour conserver un groupe il faut faire preuve de bienveillance et savoir accepter l’évolution de ses membres. C’est de tout cela dont parle Champagne ! Le vrai cadeau fut ensuite le « oui » immédiat des comédiens. J’étais très intimidé par cette bande, dont le groupe a fonctionné au-delà de mes espérances… J’ai pris beaucoup de plaisir à filmer des loups en Sibérie, mais j’en prends encore plus aujourd’hui à travailler avec des acteurs.
QU’EST-CE QUI VOUS ÉMEUT CHEZ EUX ?
Ce même manque de confiance qu’on retrouve chez de très grands comédiens. Cette fragilité, c’est l’essence même du cinéma ; on ne sait jamais comment faire les choses parfaitement car rien ne ressemble à ce qu’on imaginait. C’est très beau de se retrouver derrière son écran de caméra et de voir naître une émotion qu’on a cherché à créer. On sait qu’on a réussi à la figer.
COMMENT GÉRER TANT DE COMÉDIENS À LA FOIS SUR UN PLATEAU ?
C’était d’autant plus difficile qu’ils prenaient beaucoup de plaisir à être ensemble. Je devais parfois jouer au professeur d’école et taper de ma règle sur la table en criant : « Silence ! » Je n’avais pourtant qu’une envie : plaisanter avec eux. Mais c’est ce que les comédiens attendent aussi du réalisateur, car sinon les choses dérapent vite. Tout n’était qu’une question d’équilibre entre cette ambiance formidable et le sérieux nécessaire au bouclage des journées.
FAIRE UN FILM DE POTES, CELA NÉCESSITE DE DÉPASSER LA FICTION POUR CRÉER UNE ALCHIMIE NATURELLE ENTRE LES ACTEURS ?
J’ai effectivement tenté de fabriquer une bande en lui offrant toutes les chances de fonctionner ; cela impliquait de veiller à ce qu’il n’y ait aucune animosité entre les comédiens. Dans le cinéma comme dans la vie, il y a parfois des passifs qui empêchent la bonne entente sur le plateau. Le groupe a donc été validé par les uns et les autres, et j’ai même écarté une comédienne pour cette raison. L’alchimie entre les acteurs était donc explicite dès le départ.
Y A-T-IL AUTANT D’IMPRÉVUS SUR LE PLATEAU D’UNE FICTION QUE SUR CELUI D’UN DOCUMENTAIRE ANIMALIER ?
Je dirais qu’il y a des imprévus provoqués. Si vous voulez qu’il y ait une part d’improvisation, de liberté sur certaines séquences, il faut que tout soit paradoxalement bien préparé et découpé à l’avance. Contrairement à ce que l’on peut penser, une comédie c’est de l’horlogerie. On cherche à créer une émotion qui ne peut fonctionner qu’à un dixième de seconde près ! Si et seulement si tout cela est extrêmement préparé à l’avance, cela vous laisse la possibilité à vous et à vos acteurs de s’écarter de la route lors du tournage.
COMMENT AVEZ-VOUS PENSÉ À RÉUNIR ELSA ZYLBERSTEIN ET STÉFI CELMA EN COUPLE LESBIEN ? C’EST ASSEZ INÉDIT DANS UN GENRE RELATIVEMENT TRADITIONNEL.
J’avais envie d’y intégrer un couple moderne, même si le mot est peut-être mal choisi. Cela permet de parler d’adoption, et d’un certain nombre de sujets qui ne sont précisément pas des sujets au sein du film. La sexualité de mes héroïnes n’est jamais un sujet, j’y tenais particulièrement.
VOUS AVEZ TOURNÉ DANS UN VIGNOBLE. QUEL EST VOTRE RAPPORT À CE LIEU SINGULIER ET À L’ART DU VIN EN GÉNÉRAL ?
Le champagne est une boisson qu’on ouvre au moins avec quelqu’un d’autre, à part si on déprime (rires). Elle symbolise parfaitement l’amitié, et puis j’ai découvert sur place un territoire que je ne connaissais pas. J’y ai trouvé beaucoup de relief, contrairement à ce que j’aurais pu imaginer ! En plus on a été servis par une lumière extraordinaire… parce qu’il a fait mauvais temps, or comme chacun sait il n’y a rien de pire qu’un grand ciel bleu pour le cinéma. Lorsque vous bénéficiez d’un ciel chargé, cela offre des ombres incroyables. On a vraiment eu de la chance, sans parler du fait qu’on touchait du doigt le monde passionnant des artisans vignerons.
SI VOUS FILMEZ MOINS LA NATURE, VOTRE TOURNAGE ÉTAIT ENTIÈREMENT ÉCORESPONSABLE. C’ÉTAIT VOTRE CHOIX ?
Cela fait très longtemps, bien avant que ce ne soit à la mode que j’ai demandé à ce qu’on réduise au maximum l’empreinte écologique sur mes tournages. Beaucoup se sont inspirés de ce qu’on a pu faire sur certains de mes films ! Dans le cinéma comme partout, on se doit d’être irréprochable à ce niveau ; d’utiliser au maximum des produits, des acteurs et des figurants locaux pour réduire les déplacements, etc. On ne devrait même pas se poser la question ! Je suis gêné de savoir qu’aujourd’hui on distingue encore les tournages écoresponsables des autres.
Visuels de couverture & illustration : Elsa Zylberstein, Valérie Karsenti, Stéfi Celma, François-Xavier Demaison, Marie-Julie Baup, Stéphane De Groodt, Claire Chust, Eric Elmosnino, Sylvie Testud – Champagne ! | Copyright SND
08 juin 2022