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BATTLE ROYALE
Un jeu cruellement brillant
« Avez-vous déjà tué votre meilleur ami ? ». Cette punchline présente sur les affiches à la sortie de Battle Royale en France en 2001 annonçait bien la couleur. Retour sur un film-phénomène futuriste venu du Japon que les cinémas UGC proposent de (re)découvrir en salles les jeudi(s) 20 et 27 janvier.
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« Avez-vous déjà tué votre meilleur ami ? ». Cette punchline présente sur les affiches à la sortie de Battle Royale en France en 2001 annonçait bien la couleur. Retour sur un film-phénomène futuriste venu du Japon que les cinémas UGC proposent de (re)découvrir en salles les jeudi(s) 20 et 27 janvier.
BATTLE ROYALE - Un jeu cruellement brillant - ILLIMITÉ
Entre une violence frontale et un humour noir, dont la provocation ne pouvait que séduire les adolescents auquel le film était de toute évidence destiné, Battle Royale a immédiatement suscité de vives polémiques dans son pays d’origine (il y fut interdit aux moins de 15 ans) et à l’étranger (interdit aux moins de 16 ans en France, il lui fallut onze ans pour être distribué aux États-Unis !). Imaginée à l’occasion d’un roman – puis d’un manga – par un journaliste de 30 ans, Koshun Takami, l’histoire suit des élèves d’une classe de 3ème emmenés de force sur une île coupée du monde. Sur place, ils se voient contraints de jouer au chat et à la souris et de se tuer les uns les autres jusqu’à ce qu’il n’en reste qu’un. Le roman avait déjà fait scandale lors de sa parution en 1999, d’autant que ce mortel jeu de cache-cache s’appuyait sur une nouvelle loi promulguée par un régime très autoritaire afin d’enrayer la rébellion des adolescents du pays et de restaurer les « valeurs » traditionnelles. Le livre s’était cependant imposé comme best-seller historique.
C’est certainement ce côté « politiquement incorrect » qui a séduit ce vieux routier du cinéma japonais des années 60/70 qu’était Kinji Fukasaku. Habitué à détourner les films de yakuzas, il s’était taillé une belle réputation en enchaînant les films de séries B voire Z (soixante en quarante ans !) où seuls comptaient l’appât du gain et un individualisme forcené. Pour écrire l’adaptation du roman, Fukasaku, 69 ans, fait appel à Kenta, son fils de 27 ans ; c’est lui qui aura l’idée de la suite, Battle Royale II : Requiem, qu’il réalisera après la mort de son père en plein tournage en janvier 2003. Avec une entrée en matière sur les chapeaux de roues et un déchaînement de violence à la limite du supportable tant elle est réaliste (âmes sensibles, s’abstenir !), ainsi que de jeunes acteurs et actrices pour la plupart très convaincants, le réalisateur déploie tout son savoir-faire avec une énergie inépuisable. Il faut dire que les élèves ne disposent pas tous des mêmes armes pour se défendre, et donc pour attaquer… Cela va de la lampe de poche au fusil d’assaut !
Un film adoubé par Tarantino
Fukasaku ne néglige aucun effet (ni aucun ressort musical) pour immerger le spectateur dans ce jeu cruel et infernal où chacun est l’ennemi de tous, où on ne peut même pas se fier à ses amis les plus proches. Car, évidemment, cet hallucinant contexte fait ressurgir rivalités, ressentiments, désirs secrets… Ce n’est pas toujours très subtil mais c’est diablement efficace. Assez rapidement cependant, et sans rien perdre de son brio, le cinéaste japonais instille de l’ironie et de la distance, un peu comme dans un cartoon. Pas étonnant que Tarantino ait adoré le film (il a dédié Kill Bill à Fukasaku, et y a fait jouer une des actrices de Battle Royale : Chiaki Kuriyama). Le cinéaste japonais arrive même à instiller de l’émotion dans son intrigue. L’organisateur implacable de cette chasse à l’homme sanglante – rôle qu’il a confié à Takeshi Kitano, réalisateur des inoubliables Hana-bi et L’Été de Kikujiro et vraie star populaire au Japon, symbolise parfaitement cet équilibre : cruel et cynique certes, mais qui laisse peu à peu une certaine mélancolie le gagner…
Tout à la fois opéra de la violence, parabole sur la dérive autoritaire qui menace les sociétés hyper capitalistes, satire féroce de la télé-réalité – où on ne trouve sa place qu’en éliminant les autres –, voire des jeux vidéo, et illustration trash des interrogations existentielles de l’adolescence, Battle Royale déploie assurément une vision sombre et pessimiste du monde d’après. Et pourtant, il dit aussi qu’il ne faut pas totalement désespérer de l’amour et de l’amitié…
Battle Royale: Aki Maeda, Tatsuya Fujiwara | Copyright Dark Star Presse
Texte : Jean-Pierre Lavoignat – Visuel de couverture : Battle Royale: Takeshi Kitano | Copyright Dark Star Presse
En salles le
21 novembre 2001
21 novembre 2001