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LOS LOBOS
À hauteur d’enfant
Avec une belle ambition documentaire, le cinéaste Samuel Kishi Leopo – jusqu’ici remarqué pour ses courts métrages – donne à voir le quotidien d’une famille d’immigrés mexicains installée aux États-Unis.
Avec une belle ambition documentaire, le cinéaste Samuel Kishi Leopo – jusqu’ici remarqué pour ses courts métrages – donne à voir le quotidien d’une famille d’immigrés mexicains installée aux États-Unis.
Max et Leo, deux frères mexicains âgés de huit et cinq ans, immigrent avec leur mère (Martha Reyes Arias) à Albuquerque, au Nouveau-Mexique. Dans l’appartement miteux qu’ils partagent avec elle, les garçons, totalement déscolarisés, sont contraints d’attendre qu’elle revienne de son harassant travail quotidien. Ensemble, ils nourrissent le rêve de grimper un jour dans les manèges de Disneyland…
Si l’intrigue de Los Lobos résonne avec les difficultés connues par les Mexicains pour émigrer, eux qui sont d’autant plus stigmatisés depuis le mandat de Donald Trump, elle évoque aussi tout un pan du cinéma social américain traité du point de vue de l’enfance. On pense par exemple à The Florida Project de Sean Baker (2017), avec sa mère célibataire et Disneyland en toile de fond. Mais parti pris de Samuel Kishi est ici plus radical : sa caméra fixée au corps des deux garçons, il s’enferme littéralement avec eux dans l’appartement et épouse leur ressenti.
Une immersion saisissante
Livrés à eux-mêmes, Max et Leo s’ennuient sur leur moquette délavée. Pour leur apprendre l’anglais, leur mère s’enregistre sur un magnétophone qu’elle laisse à leur disposition, comme une présence rassurante face à l’abandon quotidien auquel ils sont confrontés. Mais l’ennui permet aussi aux garçons de cultiver leur imaginaire, qu’il passe par l’observation des allées et venues entre leurs rideaux ou par les créatures qu’ils dessinent et qui s’animent à l’écran. En évidant la parole au profit de sensations infantiles, le cinéaste permet ainsi au spectateur de faire l’expérience viscérale d’un quotidien soumis à la pauvreté, aux antipodes des promesses du rêve américain. Los Lobos fait émerger une poésie emplie d’insouciance, faite de rencontres heureuses et d’espoirs lentement mais sûrement allumés.
19 janvier 2022