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LES AMOURS D'ANAIS
Le triangle amoureux enfin réinventé
Anaïs Demoustier rayonne en trentenaire prête à tout pour aller au bout de ses désirs. Un rôle survolté qui la porte à mi-chemin entre comédie burlesque et drame romantique.
Anaïs Demoustier rayonne en trentenaire prête à tout pour aller au bout de ses désirs. Un rôle survolté qui la porte à mi-chemin entre comédie burlesque et drame romantique.
Anaïs, nichée dans son maigre studio parisien, incarne à elle seule le miroir (à peine déformé) de la jeunesse moderne. Perdue entre romantisme et individualisme, ambition et amertume, elle rechigne à devenir une adulte comme les autres et préfère courir après ses fantasmes littéraires – quitte à les perdre de vue. Les Amours d’Anaïsraconte l’histoire de cette jeune fille qui s’élance et s’élance encore, sans jamais s’essouffler ni atterrir, tornade imprévisible qui happe de son charme ceux qui croisent son chemin. D’abord Daniel, un quinqua ronflant par qui elle se laisse séduire, ensuite Émilie, la femme de Daniel et écrivaine à succès.
Voilà ce qu’il manquait à Anaïs : éprouver du désir pour plus grand que soi et, enfin, donner un sens à cet élan. Un triangle amoureux intriguant se forme autour des deux femmes de Daniel, qui auront tôt fait de l’en écarter.
Tour à tour malicieuse, bougonne ou colérique face à Valeria Bruni Tedeschi et Denis Podalydès, Anaïs Demoustier est le vrai moteur du film de Charline Bourgeois-Tacquet. Sa verve et son corps infatigables imposent leur rythme à la caméra qui, elle, s’efforce en retour d’en saisir le bouillonnement.
Excentricité lunaire
Se jouant des étiquettes, le film aussi vivifiant que son héroïne, n’hésite pas à creuser la complexité émotionnelle de ses personnages. En premier lieu celle d’Anaïs, jeune femme à la liberté ultra assumée et qui fait écho aux choix d’écriture de la cinéaste. Plus vraie que nature, son Anaïs est autant agaçante dans ses sautes d’humeur qu’amusante dans son goût de l’aventure, mais elle est aussi bouleversante dans la manifestation à demi-mot de son angoisse intime.
Cette force d’incarnation nous pousse à la suivre et, in fine, à s’attacher à son excentricité lunaire. Passé ce cap, le film peut tout se permettre : d’un vaudeville délirant à la Lubitsch, on emprunte ensuite les voies plus troubles d’un jeu de séduction aux dynamiques trop peu vues au cinéma. Se profile alors un mémorable jeu du chat et de la souris entre Anaïs et Émilie.
Sur ce terrain des fantasmes, lorsque les mots ne sont plus d’aucune aide pour Anaïs, la beauté du trajet opéré par le récit apparaît : une mise à nu progressive du film, autant que de son héroïne qui ne cherchait qu’à ressentir enfin un amour qui la laisse sans voix.
15 septembre 2021