LA PLACE D’UNE AUTRE

Lyna Khoudri en pleine imposture

Nélie (Lyna Khoudri) a échappé à une existence misérable en devenant infirmière auxiliaire sur le front en 1914. Un jour, elle prend l’identité de Rose (Maud Wyler), une jeune femme qu’elle a vue mourir sous ses yeux et qui semblait promise à un meilleur avenir. Nélie se présente à sa place chez une riche veuve, Eléonore (Sabine Azéma), dont elle devient la lectrice. Le mensonge fonctionne au-delà de ses espérances…

Librement adapté de The New Magdalen de Wilkie Collins, auteure de « romans à sensation », La place d’une autre en conserve les savoureux rebondissements. Tension et suspense parcourent le film d’Aurélia Georges (La Fille et le fleuve) non sans un certain sens du romanesque, avec la présence du personnage très victorien de la pauvre orpheline au grand cœur. Celle-ci engage la métaphore filée de la place que l’on a et de celle que l’on se donne, qu’elle soit sociale, sentimentale ou spatiale. Se dit via ses péripéties le sentiment d’injustice ressenti face à une société où les rôles sont distribués au hasard et où la morale occupe une place préoccupante.

À la croisée des genres entre film d’époque, thriller, drame sentimental et film social, le troisième long métrage d’Aurélie Georges brosse aussi le portrait d’émancipations féminines rafraîchissantes et se fait ainsi très actuel. Trois femmes de statut, d’âge et d’intérêts différents reprennent ainsi leur vie en main, notamment grâce à l’éducation, au savoir et à la pensée, sans qu’il ne soit jamais question d’homme. Un message porté avec beaucoup de rage et de conviction par l’épatante Lyna Khoudri – qui ne s’arrête plus de décrocher les premiers rôles –, aux côtés des non moins douées Maud Wyler (Perdrix) et Sabine Azéma.