Découvrez notre sélection de films Labels UGC
En corps
Marion Barbeau en interview
Première danseuse de l’Opéra de Paris et rôle principal du nouveau film de Cédric Klapisch, la lumineuse Marion Barbeau se livre sur un exercice auquel elle ne s’était encore jamais prêté : la comédie. Rencontre avec une travailleuse acharnée qui donne à En corps tout son suc.
Label Spectateurs UGC
Première danseuse de l’Opéra de Paris et rôle principal du nouveau film de Cédric Klapisch, la lumineuse Marion Barbeau se livre sur un exercice auquel elle ne s’était encore jamais prêté : la comédie. Rencontre avec une travailleuse acharnée qui donne à En corps tout son suc.
En corps - Marion Barbeau en interview
Quel rapport entreteniez-vous avec le cinéma de Cédric Klapisch avant d’être retenue comme interprète principale de En corps ?
Marion Barbeau : Les films de Klapisch se trouvent parmi les œuvres qui m’ont construite, adolescente. Je connais par cœur les répliques des Poupées russes, par exemple, film que je regardais avec ma meilleure amie. C’est une histoire qui me touchait beaucoup, notamment avec Wendy, l’Anglaise interprétée par Kelly Reilly ; je la trouvais à la fois hyper séduisante et hyper émouvante, et j’adorais la bande-son du film. J’aime aussi beaucoup Peut-être avec Jean-Paul Belmondo. En fait, j’avais l’impression de connaître Cédric avant de le rencontrer !
Le film montre plusieurs troupes d’artistes évoluer, se déplacer. Le tournage vous a-t-il donné une impression similaire ?
On m’avait dit que les tournages de Cédric ressemblaient à des colonies de vacances et ça a été le cas ! Le moment de résidence en Bretagne a été assez troublant parce que toute la compagnie de Hofesh Shechter (qui joue son propre rôle de chorégraphe dans le film, ndlr) se trouvait avec nous. J’avais parfois vraiment l’impression d’en faire partie. Nous résidions tous dans le même hôtel, ce qui a permis beaucoup d’échanges, une vraie curiosité des acteurs pour les danseurs et vice-versa. Je crois que l’on ressent cette ambiance dans le film…
Vous avez l’habitude qu’on filme votre travail en tant que danseuse mais ici c’est un tout autre aspect que la caméra capte ; il y a le jeu qui s’ajoute, d’autres émotions que l’on vient chercher…
Ce ne sont pas forcément d’autres émotions. Certes, dans un film, il y a du texte mais le sous-texte est le même, il s’agit simplement d’un langage différent. Ce qui est toutefois très agréable à la caméra, c’est que lorsque l’on pense quelque chose, ça se voit directement. Parfois, sur scène, on pense quelque chose mais comme on est à l’Opéra Bastille, personne ne s’en rend compte (rires). Ça peut être assez frustrant, notamment dans les ballets classiques où il faut un peu surjouer pour se faire comprendre. Devant la caméra, il y a seulement besoin d’être !
Si les émotions sont les mêmes, elles passent cette fois aussi par les mots. Vous exprimer par ce biais – et plus encore interpréter un personnage – a-t-il été simple pour vous ?
J’avais très peur, je ne m’en pensais pas capable. Et puis comme il a fallu se lancer et que j’ai vu que Cédric me faisait confiance, les choses se sont fait assez naturellement. J’ai aussi travaillé avec une coach qui m’a beaucoup aidée sur la construction du personnage, qui m’a appris à savoir vivre la scène dans l’instant présent, à ne pas me juger…
Qu’en est-il de l’espace laissé à l’improvisation lors du tournage ?
En bonne danseuse que je suis, j’ai voulu travailler au maximum pour ensuite trouver de la liberté devant la caméra. Cédric m’a proposé d’accompagner tous les castings pour les seconds rôles et j’ai également fait des lectures avec les autres rôles principaux. C’était nécessaire. Une fois que le tournage a débuté, je me suis sentie disponible pour changer de route au besoin.
Cédric a désormais un œil aiguisé sur la danse et il avait des idées précises, mais nous avons bien entendu collaboré sur les moments dansés. C’est surtout avec Hofesh qu’il a construit les moments de danse, mais sans que ce soit de la danse, comme dans la scène de vent à Quiberon où les déplacements des personnages doivent paraître naturels alors qu’il s’agit bel et bien d’une chorégraphie.
Élise réinvente sa vie dans la douleur, la déception, mais aussi avec beaucoup de courage. Avez-vous connu des questionnements similaires dans votre jeune carrière ?
Pas jusqu’à mes 25 ans, âge où je ne me suis non pas dit que je n’avais plus envie de danser – car j’ai l’impression que ça n’arrivera jamais – mais où je me suis remise en question par rapport à l’Opéra de Paris. Je fais partie de cette institution, mon nom lui est vraiment accolé et j’avais des envies d’émancipation. Le fait de rencontrer Hofesh m’a donné des envies nouvelles. Ça n’a pas été simple car remettre en question l’Opéra, c’est un peu remettre en question ma famille ; c’est là d’où je viens et c’est ce qui m’a construite, d’où une certaine sensation de vertige.
En quoi le jeu justement nourrit-il désormais votre rapport à la danse ?
C’est très intéressant car pour En corps, nous avons d’abord tourné les scènes de danse contemporaine (qui interviennent dans la deuxième partie du film pour le spectateur, ndlr). Ensuite, il y a eu une période où je n’ai fait que du jeu puis j’ai retravaillé la partie classique pour finir le tournage là-dessus. Il a donc littéralement fallu me remettre en jambes, ce qui n’est pas évident, mais je me suis rendu compte que ma tête était complètement vide et que j’étais tout à fait disponible pour travailler avec ma coach. Le jeu m’avait permis cela. C’est quelque chose qui ne m’était pas arrivé depuis longtemps dans mon métier, en danse, car on est toujours dans l’exigence. Or là, il y a eu un lâcher-prise…
La comédie est-il un univers que vous avez à nouveau envie d’explorer ?
Le film m’a donné envie de continuer de danser jusqu’à la fin de ma vie. Et puis j’ai tellement aimé jouer que je serais très heureuse de recommencer, même sans qu’il s’agisse d’un rôle où je danse.
En corps : Marion Barbeau | Copyright Emmanuelle Jacobson-Roques – CQMM
Visuel de couverture : Marion Barbeau / Copyright Laura Pertuy
En salles le
30 mars 2022
30 mars 2022