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Jean-Luc Godard
Sa carrière en cinq chefs-d’œuvre
Figure emblématique de la Nouvelle Vague et cinéaste protéiforme, Jean-Luc Godard s’est éteint ce 13 septembre, à l’âge de 91 ans. Retour en cinq films sur une carrière monumentale, faite d’expérimentations, de coups d’éclat et, surtout, de grand cinéma.
Figure emblématique de la Nouvelle Vague et cinéaste protéiforme, Jean-Luc Godard s’est éteint ce 13 septembre, à l’âge de 91 ans. Retour en cinq films sur une carrière monumentale, faite d’expérimentations, de coups d’éclat et, surtout, de grand cinéma.
Jean-Luc Godard - Sa carrière en cinq chefs-d'œuvre
1960 : À BOUT DE SOUFFLE
Pour Jean-Luc Godard, alors critique régulier aux Cahiers du Cinéma et réalisateur d’une poignée de courts-métrages, penser le cinéma ne suffit plus : il faut s’en emparer. Inspiré par son ami Truffaut, dont le premier long Les Quatre Cent Coups (1959) vient de triompher à Cannes, Godard se met en tête d’écrire et réaliser son propre long-métrage.
Fort de son succès critique et public, À bout de souffle devient le film emblématique de la Nouvelle Vague. Une ode à la liberté, portée par un couple de cinéma inoubliable (le duo Seberg-Belmondo), qui envoie valser sans ménagement la grammaire cinématographique traditionnelle. En témoigne sa séquence d’ouverture, où Belmondo/Poiccard enjoint littéralement le spectateur à aller se faire voir : « Si vous n’aimez pas la mer, si vous n’aimez pas la montagne, si vous n’aimez pas la ville… allez vous faire foutre ! »
1965 : PIERROT LE FOU
Lors de la sortie de Pierrot le fou, Godard est d’ores et déjà reconnu comme une valeur sûre du cinéma français. À un rythme quasi-stakhanoviste (à raison de plusieurs films par an), le cinéaste enchaîne les succès (Le Mépris en 1963), mais aussi quelques contretemps (Une femme est une femme en 1960).
Cette période est marquée par son mariage avec Anna Karina, sa « muse » et l’héroïne de sept de ses films (Le Petit Soldat et Vivre sa vie en tête), dont le déroulé tumultueux sera l’une des sources principales d’inspiration de Pierrot le fou. L’actrice forme avec Jean-Paul Belmondo un nouveau couple godardien, Ferdinand et Marianne, qui fuit l’ennui de la métropole parisienne pour se réfugier dans la douceur du Sud de la France. En résulte un précurseur du road movie, à la lisière du surréalisme, où de drôles d’intrigues criminelles côtoient avec passion les écrits de Rimbaud.
1980 : SAUVE QUI PEUT (LA VIE)
Profondément marqué par Mai 68, Jean-Luc Godard délaisse le cinéma commercial au profit d’une décennie d’expérimentations vidéo et de films militants. Jusqu’à son grand retour à l’industrie avec Sauve qui peut (la vie), un film baroque qui ne ressemble à rien de connu.
Sa renommée lui permet d’attirer les stars (on y croise Jacques Dutronc, Nathalie Baye et la jeune Isabelle Huppert) et de renouer avec son public, mais dans des films avant-gardistes qui se jouent du langage cinématographique. Construit comme une « partition musicale » où l’on suit 3 personnages aux prises avec la modernité, dont le parcours à la fois drôle et cruel d’une prostituée campée par Huppert, Sauve qui peut (la vie) est une hilarante satire sociale filmée avec un plaisir enfantin, où Godard s’autorisait déjà les plus surprenantes excentricités visuelles.
1988-1998 : HISTOIRE(S) DU CINÉMA
Après une décennie de films irrévérencieux et hétéroclites, voire de scandales médiatiques avec Je vous salue, Marie (1985), Jean-Luc Godard cultive un projet pharaonique : raconter l’histoire du cinéma « comme un roman personnel », à travers un film qui mêlerait les images d’autres films – ceux qui l’ont fait rêver.
C’est le début d’une série en quatre chapitres où, superposée à un collage expérimental de plus d’une centaine d’extraits de films, parfois déformés ou remaniés par Godard lui-même, sa voix d’outre-tombe nous parvient en off. Il y raconte « son » histoire du cinéma, son interprétation de celle-ci avec la poésie qu’on lui connaît ; le réalisateur s’improvise alors historien, excavateur d’une histoire du monde transfigurée par le cinéma. En résulte un film-somme, tourbillon visuel et sonore comme hanté par les fantômes d’un XXe siècle finissant.
2014 : ADIEU AU LANGAGE
Las d’un cinéma qu’il a déjà exploré et réexploré, Jean-Luc Godard entre au XXIè siècle par la voie de l’expérimentation, quitte à proposer des œuvres toujours plus radicales qui déroutent son public.
Adieu au langage en est l’exemple idéal : plus de narration à proprement parler, mais un poème cinématographique qui ambitionne d’embrasser au passage les nouvelles techniques vidéo comme la 3D. Comme constamment ressuscité, le cinéaste proposait là un ovni digne d’un tout premier film, du premier film d’une histoire du cinéma à recommencer. Plus organique que jamais, le résultat est digne des peintres primitifs et l’on se plaît à décoder un maëlstrom d’images de natures variées : peu étonnant que le film soit d’ailleurs en partie raconté du point de vue d’un animal, le chien du cinéaste. Il a remporté le Prix du jury au Festival de Cannes 2014.
Visuel de couverture : Photo Alain Fleischer, Jean-Luc Godard – Morceaux de conversations avec Jean-Luc Godard | Copyright Editions Montparnasse