LE FABULEUX DESTIN D’AMÉLIE POULAIN

Un bonheur de film devenu phénomène mondial

Un film qui ne ressemble à aucun autre. Un feu d’artifice de trouvailles visuelles et scénaristiques. Un manège enchanté qui exalte la fantaisie, l’imagination et le rêve. Un Paris de carte postale où les chromos prennent vie et débordent de tendresse, de nostalgie et d’espérance. Un film qui a atteint l’objectif de son réalisateur : rendre les gens heureux.

Après Alien, la résurrection (1997) qu’il a réalisé pour la Fox, Jean-Pierre Jeunet n’a pas manqué de propositions américaines mais il a préféré revenir à ses premières amours : Paris. Reprenant les notes qu’il avait emmagasinées avant son départ pour Hollywood sur des situations tendres, drôles ou incongrues, repérées dans la vie de tous les jours ou sorties de son imagination, sur ces petits riens qui emplissent le quotidien, Jeunet trouve un jour leur trait d’union : l’histoire d’une jeune fille qui a décidé de « réparer » la vie de ceux qui l’entourent en intervenant incognito dans leur existence.

L’occasion, pour lui, de laisser libre cours à sa fantaisie, de réinventer un Paris fantasmé et de composer une galerie de personnages singuliers et attachants qu’il confiera, comme à son habitude, à de formidables seconds rôles.

Un absolu du conte de fées

Si Jeunet porte ce film en lui, la production va s’avérer plus compliquée. Emily Watson, qui l’a bouleversé dans Breaking the Waves et qui lui a donné son accord de principe, se désiste soudain. Son fidèle chef-opérateur, Darius Khondji, fait désormais carrière aux États-Unis et n’est plus libre. La musique de Michael Nyman, dont il rêvait, est inabordable…

Il est à deux doigts du renoncement lorsque le destin s’en mêle : UGC, dernière chance du réalisateur décide de financer le film à la lecture du scénario. Il découvre Audrey Tautou sur l’affiche de Vénus Beauté, lui fait passer des essais et l’engage au bout de trois minutes. Il retrouve le directeur de la photo d’un de ses courts-métrages, Bruno Delbonnel, qui y gagnera une carrière internationale. Plus tard, dans une voiture qui l’emmène sur le tournage, il entendra la musique de Yann Tiersen qui le séduira instantanément…

Le film se fait finalement comme il devait se faire, d’autant qu’en effet le charme d’Audrey Tautou, sa détermination, son regard tour à tour espiègle et mélancolique, et le couple qu’elle forme avec son « prince charmant » (excellent Mathieu Kassovitz) feront merveille.

Tout comme les seconds rôles : Jamel Debbouze, Dominique Pinon (son acteur fétiche), Isabelle Nanty, Rufus… Sans parler de la voix d’André Dussollier. Le succès est immédiat. Parce qu’il renvoie à l’enfance, fait l’éloge de la générosité et de l’imagination, fait croire en l’amour, et enfin parce qu’il incite chacun à ne pas passer à côté de sa vie. Mais surtout parce que, au-delà de ces bons sentiments que Jeunet a su faire sonner juste, il y a un vrai regard de cinéaste, et aussi l’ambition et l’exigence d’un artiste.

Jean-Pierre Lavoignat

Visuels : Le Fabuleux Destin d’Amélie Poulain : Copyright Bruno Calvo