UNE FEMME DU MONDE

Elle est libre, Laure

Installée à Strasbourg, Marie se prostitue depuis 20 ans. Elle a son bout de trottoir, ses habitués, sa liberté… et un fils, Adrien, de 17 ans. Pour lui permettre de poursuivre des études de cuisine, Marie doit trouver une somme conséquente d’argent en peu de temps. Ses ambitions se voient vite contrées par la représentation tristement négative du métier qu’elle exerce. C’est sans compter sur sa force de caractère…

Arrimé à la réalité, Une femme du monde flirte très souvent avec la forme documentaire sans jamais se borner à restituer le seul milieu de la prostitution. Très vite, la profession de Marie est rendue commune, ni plus ou moins banale qu’une autre, tant le propos de la réalisatrice s’incarne ailleurs. Car c’est surtout un personnage que veut esquisser Cécile Ducrocq, une femme qui avance à la force de son imperturbable optimisme. Marie traverse l’existence comme s’il s’agissait d’un terrain de bataille jalonné des habituels rendez-vous à la banque, au lycée, sans jamais se départir de ses valeurs. Militante, elle lutte pour la dépénalisation de sa clientèle aux côtés d’autres prostituées indépendantes et s’inquiète du sort de celles qui travaillent – et vivent – au crochet d’un mac.

Porté par un female gaze bienvenu – où il n’est jamais question d’érotiser le corps des femmes mais bien de le montrer tel qu’il est, au quotidien –, Une femme du monde s’appuie sur le jeu nuancé de Laure Calamy (Antoinette dans les Cévennes), parfaite dans ce rôle de femme en pleine possession de sa liberté. Loin des personnages caricaturaux de « battante », la comédienne césarisée incarne le feu d’une femme fière de ce qu’elle est, dans les coups durs comme dans les réjouissances du quotidien. Le duo qu’elle forme avec le jeune Nissim Renard (Évolution) est d’une vérité criante et interroge la transmission qui s’orchestre – parfois difficilement – entre un parent et son enfant. Une femme du monde raconte sans jamais faiblir la lutte perpétuelle pour vivre la vie que l’on s’est choisie, envers et malgré tout.